You are currently viewing Tout savoir sur la DHEA après 35–40 ans : libido, énergie, masse musculaire, légalité.

C’est une petite pilule qui a fait couler beaucoup d’encre. La DHEA, ou déhydroépiandrostérone, est souvent présentée comme l’« hormone de jouvence ». Découverte dans les années 1960 par le biochimiste français Étienne-Émile Baulieu, cette hormone stéroïde naturelle a connu son heure de gloire médiatique au début des années 2000.

À l’époque, des premières études laissaient entendre qu’elle pourrait améliorer la qualité de la peau, renforcer les os et raviver la libido chez les femmes ménopausées. Le grand public s’est alors pris à rêver d’un élixir anti-âge en libre accès.

Plus de vingt ans plus tard, que reste-t-il de ces promesses ? La DHEA est-elle vraiment utile passé 35 ans, alors que son taux commence à baisser dans l’organisme ? Ou bien s’agit-il d’un mirage, potentiellement dangereux et illégal sans encadrement médical ?

Cet article est une enquête pour trancher sur la DHEA en l’état actuel des connaissances scientifiques.

Si vous voulez mon point de vue personnel sur le sujet, regardez ma vidéo ci-dessous.

Voir les liens cités en fin de vidéo : Dossier testostérone → https://www.Fitnessmith.fr/testosterone/

La DHEA est souvent vendue sous forme de gélules ou de comprimés, généralement dosés entre 25 et 50 mg. En France, de tels compléments ne peuvent être obtenus que sur prescription médicale, contrairement aux États-Unis où cette hormone est disponible librement comme un simple « supplément anti-âge ». Ce statut de vente libre outre-Atlantique a contribué à sa popularité initiale, avant que la science ne tempère les promesses.

Je me souviens que c’était la même chose pour la mélatonine avant son autorisation à la vente sans ordonnance en 2014. Il y avait souvent des espérances au-delà des effets réels.

Comment agit cette hormone ? Est-elle un moyen efficace de booster la testostérone ou la vitalité chez l’homme après 35 ans ? Qu’en est-il de son usage chez la femme, à l’approche de la ménopause ? Faut-il y voir une pilule de la jeunesse ou une pratique à risque assimilable au dopage ? Cet article fait le point sur l’usage de la DHEA et les réponses qu’apportent aujourd’hui la science et les experts.

Qu’est-ce que la DHEA ?

La déhydroépiandrostérone (DHEA) est une hormone stéroïde naturellement produite par le corps, en majorité par les glandes surrénales situées au-dessus des reins[1]. On en trouve aussi de petites quantités fabriquées localement dans le cerveau, les ovaires et les testicules.

Biochimiquement, la DHEA est un précurseur des hormones sexuelles : une fois sécrétée, elle peut se transformer en androgènes (hormones « masculines » comme la testostérone) ou en œstrogènes (hormones « féminines ») selon les besoins de l’organisme.

Cette conversion se déroule principalement dans les tissus périphériques, selon un mécanisme qu’un endocrinologue canadien, Fernand Labrie, a nommé « intracrinologie ». Après la ménopause par exemple, la DHEA circulante devient quasiment l’unique source d’œstrogènes et de testostérone chez la femme, via une production locale dans chaque organe cible[2][3].

La DHEA, ici représentée en modèle moléculaire, est un stéroïde comportant 19 atomes de carbone. Cette structure lui permet d’être aisément convertie en hormones sexuelles (testostérone ou œstradiol) dans l’organisme. La ressemblance de sa charpente chimique avec celle d’autres stéroïdes explique en partie la multiplicité de ses effets biologiques.

La DHEA est l’une des hormones les plus abondantes chez l’adulte jeune. Elle atteint un pic de concentration vers la vingtaine, puis décroît graduellement avec l’âge.

À 60 ans, on n’en retrouve plus que 10 à 20 % du niveau mesuré à 20 ans[4]. Cette chute a d’ailleurs été corrélée à certains effets du vieillissement – baisse de l’énergie, troubles de l’humeur, diminution de la masse musculaire maigre – sans qu’il soit clair s’il s’agit d’une cause ou d’une conséquence de ces phénomènes.

Quoi qu’il en soit, l’idée de compenser cette baisse hormonale par une supplémentation en DHEA a rapidement germé dans les milieux de la médecine anti-âge. Dès la fin des années 1990, la DHEA commence à être proposée comme complément « pour vieillir jeune », proposée aux États-Unis en vente libre comme un simple “anti-aging supplement”.

En France, des personnalités scientifiques de premier plan comme le Pr Baulieu ont contribué à populariser l’hormone auprès du grand public, tout en menant des essais cliniques pour en évaluer les effets chez les seniors.

Fontaines de jouvence : entre espoirs et désillusions

Les premiers résultats, bien que modestes, ont alimenté l’engouement. Une étude pilote conduite par Étienne-Émile Baulieu et la gériatre Françoise Forette au début des années 2000 avait rapporté quelques bienfaits chez des septuagénaires : amélioration de l’hydratation cutanée, légère augmentation de la densité osseuse, regain du désir sexuel et meilleur « tonus » global.

Des magazines grand public titraient alors sur le « secret de la jeunesse éternelle » que représenterait la DHEA. Chez les sportifs, certains y voyaient même un nouvel anabolisant légal capable d’augmenter la masse musculaire sans les risques des stéroïdes anabolisants classiques.

Mais l’enthousiasme a vite été douché par des études plus rigoureuses. En 2006, un large essai clinique randomisé mené sur deux ans aux États-Unis a comparé, chez des seniors de plus de 60 ans, les effets d’une prise quotidienne de DHEA (50 mg) à un placebo. Verdict sans appel : aucune amélioration significative de la force musculaire, des performances physiques, de la densité osseuse ou de la qualité de vie n’a été observée dans le groupe DHEA par rapport au placebo[5]. « La recherche de la jeunesse éternelle continuera, mais la restauration de la DHEA ou de la testostérone à des niveaux “physiologiques” n’apporte aucune solution et ne devrait pas être tentée », a commenté le Dr Paul Stewart, de l’Université de Birmingham, dans un éditorial accompagnant l’étude.

En clair, ni la DHEA ni même de faibles doses de testostérone ne se sont révélées être l’élixir anti-âge espéré. Tout au plus a-t-on constaté une petite hausse de la masse maigre chez les hommes sous testostérone, et un léger gain de densité osseuse dans certains sites (radius, fémur) avec l’un ou l’autre des traitements, mais des effets bien inférieurs à ceux des traitements conventionnels de l’ostéoporose.

Ces résultats négatifs ont marqué un tournant. En France, l’Agence de sécurité sanitaire (Afssaps) a estimé dès 2007 que les preuves d’efficacité de la DHEA dans le traitement des effets liés à l’âge étaient insuffisantes, et a déconseillé son usage au vu des possibles effets indésirables.

Depuis, la popularité de la molécule a chuté : son usage actuel est deux fois moins fréquent qu’il y a dix ans, selon le Vidal, référence des professionnels de santé. Les autorités de santé rappellent qu’aucune pilule ne saurait remplacer les fondamentaux du vieillissement en bonne santé : une activité physique régulière, une alimentation équilibrée, un sommeil de qualité et la prise en charge des maladies chroniques éventuelles.

Pour les hommes de plus de 40 ans confrontés à une baisse de forme liée à la diminution progressive de leurs hormones (un phénomène parfois qualifié d’andropause), mieux vaut se pencher sur ces leviers naturels plutôt que de céder aux sirènes de compléments miracles. À ce sujet, n’hésitez pas à consulter notre dossier « Pourquoi la testostérone diminue après 40 ans (et comment y remédier) », qui détaille les causes du déclin hormonal masculin et les stratégies pour y faire face sans risque.

DHEA et testostérone : l’illusion d’un booster hormonal

Une des raisons pour lesquelles la DHEA intéresse particulièrement les hommes est son lien avec la testostérone. Puisque la DHEA peut se convertir en testostérone, beaucoup ont imaginé qu’en prendre sous forme de pilule augmenterait mécaniquement le taux de testostérone dans le sang, améliorant ainsi la vitalité, la masse musculaire ou la libido. En réalité, les choses sont plus complexes.

Chez un homme jeune en bonne santé, les apports externes de DHEA n’entraînent généralement pas de hausse notable de la testostérone endogène, car le corps régule finement ses équilibres hormonaux. Les études montrent que la supplémentation en DHEA peut augmenter modestement le taux de DHEA circulant et d’autres métabolites (comme l’androstènedione ou les œstrogènes), mais sans gains de force musculaire à la clé[6].

Une méta-analyse citée par la Harvard Medical School a bien trouvé une légère augmentation de la masse maigre et une diminution du pourcentage de graisse chez des adultes prenant de la DHEA, mais sans progression nette des performances physiques mesurables. En somme, un peu plus de muscle sur la balance, mais pas plus de force au rendez-vous.

Chez l’homme plus âgé présentant un réel hypogonadisme (déficit pathologique en testostérone), les spécialistes de l’endocrinologie privilégient clairement la testostérone de substitution encadrée médicalement, plutôt que la DHEA. « La DHEA n’est pas un traitement reconnu du déficit en testostérone lié à l’âge », insiste le Pr Shalender Bhasin, de l’École de médecine d’Harvard, co-auteur des recommandations 2018 de l’Endocrine Society sur la prise en charge de l’hypogonadisme.

Ces guidelines, tout comme celles de l’Association Européenne d’Andrologie en 2020, ne retiennent pas la DHEA dans l’arsenal thérapeutique du déclin hormonal masculin. Les recherches de pointe – comme les Testosterone Trials menés aux États-Unis chez des hommes de plus de 65 ans – se sont concentrées sur la testostérone elle-même (sous forme de gel ou d’injection), évaluant ses bénéfices sur la densité osseuse, l’anémie, la vitalité sexuelle ou la cognition. La DHEA est restée en marge, son intérêt n’ayant pas été démontré dans ces études d’ampleur.

Le Pr Peter Snyder (Université de Pennsylvanie), investigateur principal de ces Testosterone Trials, a d’ailleurs résumé la situation ainsi : « chez le sujet âgé, restaurer la testostérone peut apporter quelques bénéfices ciblés, mais restaurer la DHEA n’a pas montré d’effet tangible ».

Du côté de la performance sportive, la DHEA est aujourd’hui considérée comme un leurre. Si elle figure sur la liste des substances dopantes, c’est par souci d’anticipation, car la DHEA est en théorie un stéroïde anabolisant. Mais en pratique, ses effets anabolisants sont très faibles par rapport à la testostérone ou ses dérivés synthétiques.

Certains bodybuilders des années 2000 l’ont essayée à haute dose, avec des gains mineurs et des effets secondaires indésirables (acné, baisse du « bon » cholestérol…), si bien que son usage a perdu de l’attrait.

Mieux vaut se tourner vers des méthodes naturelles pour soutenir sa testostérone : entraînement musculaire adapté, apport suffisant en nutriments clés (par exemple le zinc, dont une carence peut faire chuter le taux de testostérone), gestion du stress et du sommeil, etc. À ce propos, nous renvoyons nos lecteurs vers notre cours exclusif « Comment augmenter sa testostérone naturellement » qui détaille des conseils pratiques pour optimiser naturellement son taux de testostérone sans risque pour la santé.

Place de la DHEA chez la femme : ménopause, fertilité et particularités

Bien que la DHEA soit souvent associée à l’anti-âge chez l’homme, c’est chez la femme qu’elle joue un rôle physiologique particulièrement intéressant. Après la ménopause, les ovaires cessent de produire des œstrogènes et des androgènes. La DHEA, sécrétée principalement par les surrénales, devient alors la seule source de fabrication d’hormones sexuelles dans l’organisme féminin[7].

Cette DHEA circulante est convertie localement en œstradiol et en testostérone dans les tissus (peau, os, muqueuses génitales, etc.) – sauf dans l’utérus où cela pourrait stimuler la muqueuse – fournissant juste ce qu’il faut d’hormones là où il le faut, sans faire exploser les taux sanguins.

C’est l’intracrinologie selon le Dr Labrie. Cependant, il y a un hic : à 50 ans, le niveau de DHEA est déjà 60 % plus bas qu’à 20 ans, et continue de chuter par la suite. Cette diminution contribuerait à certains symptômes de la ménopause : fatigue, baisse de la libido, sécheresse vaginale, fonte musculaire, etc. D’où l’idée d’une supplémentation en DHEA pour atténuer ces effets.

Les essais cliniques conduits chez la femme ménopausée ont donné des résultats mitigés. En France, une équipe a administré de la DHEA par voie orale pendant un an à des femmes de plus de 70 ans : on a noté un léger mieux sur la densité minérale osseuse et sur la sexualité (libido) dans certains cas, mais avec de fortes variations individuelles. Surtout, d’autres études n’ont pas retrouvé d’amélioration significative des bouffées de chaleur, de l’humeur ou de la mémoire.

La voie d’administration semble beaucoup jouer. La DHEA en crème appliquée sur la peau a montré des effets positifs sur l’hydratation et l’épaisseur de la peau vieillissante dans de petits essais. Surtout, la DHEA intravaginale (appelée prastérone, disponible sur ordonnance) s’est révélée efficace pour traiter l’atrophie vaginale et les douleurs durant les rapports chez les femmes ménopausées. Ce traitement local, approuvé dans plusieurs pays, permet de restaurer la souplesse de la muqueuse vaginale sans entraîner d’élévation significative des hormones dans le sang, et sans stimuler l’endomètre utérin.

En revanche, la DHEA n’a pas fait ses preuves de manière probante sur d’autres symptômes de la ménopause comme les bouffées de chaleur ou les troubles de l’humeur.

Qu’en est-il de l’usage de la DHEA chez les femmes plus jeunes, notamment dans le cadre de la fertilité ? Dans certains protocoles de procréation médicalement assistée (PMA), les médecins ont expérimenté la DHEA à fortes doses chez des femmes autour de 35-40 ans présentant une diminution de la réserve ovarienne. Quelques études suggèrent que la prise de 75 mg de DHEA par jour pendant plusieurs mois pourrait augmenter le nombre de follicules recrutés par les ovaires et améliorer légèrement les taux de succès de FIV chez ces patientes en insuffisance ovarienne prématurée. Toutefois, ces données restent préliminaires et controversées. Ce n’est pas un usage officiellement validé, et cela doit impérativement se faire sous étroite supervision médicale car la DHEA n’est pas sans risques (nous y reviendrons).

Pour la femme non ménopausée en bonne santé, l’intérêt d’une supplémentation est quasiment nul : à 35 ans, même si le taux de DHEA a pu baisser par rapport à la vingtaine, il demeure généralement suffisant pour le bon fonctionnement hormonal. Mieux vaut adopter une hygiène de vie sportive et équilibrée pour soutenir ses hormones naturellement. Par exemple, une routine de musculation adaptée après 50 ans s’avère très bénéfique pour les femmes en péri-ménopause ou post-ménopause – voir notre article « Musculation et Ménopause : maximisez votre forme après 50 ans » à ce sujet.

De même, un focus sur la nutrition spécifique des femmes sportives (besoins en protéines, calcium, vitamine D, oméga-3, etc.) est crucial – voir notre article « Nutrition de l’athlète féminine : comprendre les besoins spécifiques » – et contribuera à atténuer les changements métaboliques de la quarantaine, comme expliqué dans notre guide « Comment augmenter son métabolisme après 40 ans ». En résumé, chez la femme comme chez l’homme, la priorité doit aller aux mesures de terrain (exercice, nutrition, sommeil) avant d’envisager des hormones dites « anti-âge ».

Bénéfices revendiqués vs réalité scientifique sur la DHEA

Revenons à la DHEA elle-même : que peut-on vraiment en attendre selon la science actuelle ? Plusieurs allégations ont été faites autour de ce complément hormonal, qu’il convient de confronter aux données disponibles :

  • Effets sur la composition corporelle et la force musculaire : Des pratiquants de musculation ont espéré que la DHEA les aiderait à prendre du muscle et à perdre du gras. Les essais cliniques montrent au mieux de légères modifications de la composition corporelle (un peu plus de masse maigre, un peu moins de masse grasse), mais sans gain de force ni amélioration de la performance physique mesurable. En somme, la DHEA n’est pas un stéroïde anabolisant efficace pour augmenter la puissance musculaire. Son effet anabolisant est qualifié de « léger » même par le Vidal, qui justifie toutefois son interdiction dans le sport pour cette raison.
  • Énergie, bien-être et humeur : La DHEA est parfois présentée comme un coup de fouet pour retrouver de l’énergie et un moral au beau fixe en vieillissant. Ici, les résultats scientifiques sont contradictoires. Aucun effet notable sur les fonctions cognitives ni la longévité n’a pu être démontré jusqu’à présent. Sur l’humeur, quelques petites études ont suggéré un possible effet antidépresseur léger chez des personnes souffrant de dépression ou de fatigue chronique, mais les preuves sont de faible qualité et ces essais n’ont pas été reproduits à grande échelle. En pratique, la DHEA n’est pas un traitement de première ligne contre la dépression ou le burn-out, et son impact sur le sentiment de bien-être varie beaucoup selon les individus.
  • Libido et fonction sexuelle : Avec l’âge, la baisse des hormones peut s’accompagner d’une diminution de la libido chez l’homme comme chez la femme. Des suppléments de DHEA sont vendus pour « relancer la machine ». Que disent les études ? Les résultats sont mitigés. Quelques travaux ont noté de légères améliorations de certains aspects de la fonction sexuelle chez des personnes d’âge mûr : un peu plus de désir, une meilleure lubrification chez la femme, ou des rapports un peu plus fréquents. D’autres études, en revanche, n’ont trouvé aucun effet significatif par rapport au placebo. Au final, la DHEA n’est pas la panacée pour la libido. Chez l’homme, un faible effet positif a été mentionné dans le Vidal concernant les troubles de l’érection chez des hypertendus, mais cela reste marginal comparé aux traitements dédiés (comme le Viagra® et consorts). Chez la femme, en dehors de l’effet local vaginal déjà évoqué, la supplémentation systémique n’a pas apporté de bénéfice net sur la sexualité dans la majorité des essais.
  • Maladies liées au vieillissement (diabète, cœur, cancer) : Étant donné que la DHEA est au carrefour de multiples voies métaboliques, des chercheurs se sont penchés sur son influence possible sur le risque de maladies cardiovasculaires, de diabète ou de cancers. Des associations épidémiologiques ont pu exister (par exemple, des taux bas de DHEA observés chez des patients atteints de certaines maladies), mais aucune preuve solide ne montre qu’une supplémentation en DHEA protège contre ces maladies ou en améliore l’évolution. Au contraire, on craint qu’un apport de DHEA, en augmentant les taux d’œstrogènes et d’androgènes, ne favorise des cancers hormonodépendants latents (sein, prostate…) – un point crucial abordé dans la section risques.

En somme, la DHEA ne tient pas vraiment ses promesses en matière d’anti-âge global. Le Natural Medicines Comprehensive Database, une référence indépendante sur les compléments, conclut que la DHEA « n’influence pas le processus de vieillissement » de façon démontrée, et n’améliore ni la force musculaire, ni la fonction cognitive, ni les performances physiques de manière consistante chez les seniors.

Cela ne veut pas dire que la DHEA est dépourvue de tout effet biologique – c’est une hormone puissante à sa façon, qui agit notamment comme neurostéroïde dans le cerveau (le terme a été inventé par le Pr Baulieu en 1981 pour décrire l’action de la DHEA sur le système nerveux central). Mais entre effets au laboratoire et résultats concrets pour l’usager, il y a un fossé que la recherche n’a pas encore franchi.

Risques, effets secondaires et précautions de la DHEA

Si avaler de la DHEA ne garantit pas de rajeunir, cela peut en revanche comporter des risques pour la santé. Ses effets secondaires les plus courants, rapportés aux doses de 25 à 50 mg/jour, sont relativement bénins mais peuvent gêner : acné, peau grasse, apparition de poils indésirables (hirsutisme) ou au contraire chute de cheveux, du fait de la conversion en androgènes. Chez la femme, une voix qui s’assombrit ou s’enroue a été signalée, traduisant un effet masculinisation à doses élevées. On observe aussi parfois des troubles de l’humeur (irritabilité, nervosité) ou du sommeil (insomnie) – la DHEA pouvant se transformer en petites quantités de testostérone ou d’œstrogènes, certaines personnes y réagissent comme à un dérèglement hormonal léger.

Des effets métaboliques existent : la DHEA peut faire baisser le taux de cholestérol HDL (le « bon » transporteur de cholestérol protecteur), ce qui n’est pas souhaitable pour le cœur. Elle peut aussi interférer avec la régulation de la glycémie – on a constaté une légère diminution de la sensibilité à l’insuline chez certains patients traités, d’où une prudence chez les personnes diabétiques ou à risque de diabète. Le foie n’est pas épargné : quelques cas d’augmentation des enzymes hépatiques ont été rapportés, bien que les atteintes sérieuses du foie soient rares à ces doses. Quoi qu’il en soit, un suivi médical avec bilan sanguin régulier (hormones, profil lipidique, glycémie) est impératif si l’on entreprend un traitement à base de DHEA.

La plus grande crainte concerne les cancers hormono-dépendants. Parce que la DHEA augmente la production d’œstrogènes et d’androgènes, il est fortement déconseillé d’en prendre lorsque l’on a des antécédents personnels ou familiaux de cancer du sein, de l’utérus, de la prostate, ou de tumeur des ovaires/testicules. En théorie, nourrir l’organisme en précurseurs hormonaux pourrait « arroser » une tumeur existante sensible aux hormones et stimuler sa croissance. Ce risque reste hypothétique aux doses modérées, mais par précaution, on exclut la DHEA chez toute personne ayant eu l’un de ces cancers. Il en va de même pour les patients souffrant de conditions comme l’endométriose ou les fibromes utérins, qui sont exacerbés par les œstrogènes : la DHEA pourrait aggraver ces problèmes.

Par ailleurs, la DHEA est contre-indiquée chez la femme enceinte ou allaitante (en raison d’un risque de perturbation hormonale du fœtus ou du nourrisson) ainsi que chez les enfants et adolescents, sauf cas très particuliers en endocrinologie pédiatrique.

Les personnes atteintes du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) doivent aussi s’abstenir : elles ont souvent déjà un excès d’androgènes, et la DHEA ne ferait qu’accentuer les symptômes (acné, pilosité, irrégularités menstruelles).

Enfin, notons que la DHEA peut entrer en interaction avec certains médicaments. Par exemple, elle pourrait interférer avec les traitements hormonaux (contraceptifs, traitements de substitution), avec des médicaments pour le foie, certains anticancéreux ou les anticoagulants. La prudence impose de signaler à son médecin et à son pharmacien toute prise de DHEA, afin d’éviter un cocktail potentiellement nocif.

En résumé, la DHEA ne doit pas être vue comme un simple complément alimentaire anodin. Sans avis médical, il est risqué de s’automédiquer avec cette hormone. Et même avec un avis médical, son usage doit rester limité dans le temps. Les spécialistes estiment qu’à 25-50 mg par jour, la DHEA est “relativement sûre” sur une période allant jusqu’à 6 mois ou 1 an, mais au-delà les inconnues demeurent. Des doses plus fortes (100 mg et plus) exposent à davantage d’effets secondaires, sans bénéfice prouvé en plus.

Un produit encadré et détourné : ce que dit la loi

Outre les aspects santé, les lecteurs se posent souvent la question de la légalité de la DHEA. Le statut de cette substance diffère grandement selon les pays. En France et en Europe, la DHEA n’est pas librement vendue comme complément alimentaire. Elle est considérée comme un médicament qui ne peut être délivré que sur ordonnance, et généralement préparé en pharmacie sous forme de préparation magistrale (gélules dosées au cas par cas).

Aucun laboratoire pharmaceutique n’a d’Autorisation de Mise sur le Marché pour un médicament de DHEA « industriel » dans l’indication anti-âge. Autrement dit, si vous voyez de la DHEA en vente sur Internet ou sous le manteau, méfiez-vous : c’est illégal en France.

L’Agence antidopage et les douanes veillent au grain : en Suisse voisine, où la législation est similaire, l’importation de DHEA sans autorisation est carrément interdite pour tout un chacun (sportif ou non), et des saisies records de colis de DHEA ont lieu chaque année[8]. Les contrevenants s’exposent à la confiscation et destruction du produit, à une amende administrative, voire à des poursuites pénales s’il y a soupçon de trafic organisé.

Pourquoi une telle sévérité ? Parce que la DHEA figure sur la liste des substances dopantes de l’Agence Mondiale Antidopage. Classée parmi les stéroïdes anabolisants, elle est interdite en compétition. Mais la loi française, tout comme la loi suisse, va plus loin : elle interdit l’achat, la vente et la détention de DHEA sans prescription, y compris pour un usage privé chez un non-sportif.

Cette hormone est assimilée à un produit dopant au même titre que la testostérone, l’importer ou en faire le commerce est donc un délit. Seule exception : un médecin peut en prescrire dans un but thérapeutique légitime (par exemple dans certaines formes de lupus érythémateux disséminé, où de hautes doses de DHEA ont montré un bénéfice sur l’équilibre hormonal et la réduction des doses de cortisone). Dans ce cas, le patient doit présenter l’ordonnance à la douane ou au pharmacien, et la préparation de DHEA sera réalisée pour un mois de traitement maximum. Notons qu’en Suisse, la loi exige même que le médecin fasse une demande écrite préalable pour autoriser l’importation d’une telle préparation pour son patient.

À l’inverse, aux États-Unis, la DHEA est en vente libre depuis 1994, classée comme simple complément alimentaire. Cette différence s’explique par le statut particulier octroyé par la loi américaine DSHEA (Dietary Supplement Health and Education Act) Les Américains peuvent acheter des capsules de DHEA en pharmacie ou sur Internet librement. Cette disponibilité a conduit à des abus et à un marché florissant de « produits anti-âge », souvent sans contrôle de qualité strict. Des analyses ont montré que certains flacons de DHEA en vente libre contiennent des doses très approximatives, voire des contaminants. Attention donc aux achats sur Internet depuis la France : non seulement c’est illégal à l’importation, mais en plus la qualité du produit n’est pas garantie. Comme pour tout complément non régulé, il peut y avoir surdosage ou présence d’autres substances.

En somme, la réglementation française vise à protéger le public d’un mésusage de la DHEA. Si vous estimez malgré tout avoir une indication médicale pour en prendre parlez-en d’abord à votre médecin, sachez que cela devra se faire dans un cadre contrôlé. Et si votre but est d’en prendre pour garder la forme après 40 ans, rappelez-vous que la loi l’assimile à du dopage : le jeu n’en vaut pas la chandelle, d’autant que les bénéfices escomptés ne sont pas au rendez-vous, comme on l’a vu. Mieux vaut se tourner vers des alternatives légales et saines pour entretenir sa vitalité hormonale – réduire son stress, mieux dormir, faire de l’exercice – ce sont des piliers essentiels pour conserver un taux optimal de testostérone et de DHEA naturellement. À ce propos, notre article « Réduis le stress et préserve ta testostérone après 50 ans » offre des pistes concrètes pour ménager son système hormonal face aux pressions de la vie moderne.

Conclusion : DHEA, utile ou non après 35 ans ?

Alors, la DHEA, faut-il en prendre ou pas ? La réponse s’articule en deux temps. D’un côté, la science nous dit que, après 35 ans, la DHEA n’apporte pas de bénéfice flagrant chez la personne en bonne santé. Ce n’est pas la pilule miracle qui va vous faire retrouver vos 20 ans. Son impact sur la forme physique ou mentale est au mieux subtil et au pire inexistant dans la majorité des études sérieuses. De l’autre côté, la DHEA n’est pas un complément anodin : c’est une hormone active, avec des effets systémiques et des risques potentiels (acné, troubles hormonaux, etc.), sans oublier un cadre légal très strict en France qui réserve son usage au suivi médical.

En pratique, pour un homme autour de la quarantaine qui cherche à optimiser son taux de testostérone et sa vitalité, la DHEA n’est pas la voie royale. Mieux vaut se concentrer sur les fondamentaux du mode de vie. Adoptez une alimentation riche en micronutriments (notamment en zinc, en vitamine D, en bonnes graisses) comme expliqué dans ce dossier.

En parallèle, n’oubliez pas que certains produits courants, consommés en excès, peuvent nuire à vos hormones : par exemple, une consommation importante de lait et de produits laitiers a été associée à une baisse de la testostérone (voir Comment le lait réduit votre testostérone ?).

Maintenez une activité sportive régulière mêlant musculation et cardio modéré : l’entraînement stimule naturellement la production de testostérone et de DHEA, tandis que la sédentarité la freine. Dormez suffisamment, car c’est la nuit que le corps produit une grande partie de ses hormones anabolisantes ; un sommeil de qualité préserve autant la testostérone que la DHEA. Surveillez votre niveau de stress : le cortisol chronique (hormone du stress) antagonise les hormones sexuelles, et apprendre à le maîtriser – par la relaxation, la méditation ou d’autres techniques – peut indirectement soutenir vos hormones anabolisantes (voir « Réduis le stress et préserve ta testostérone après 50 ans »). De plus, prenez garde aux perturbateurs endocriniens présents dans l’alimentation moderne (plastiques, pesticides, excès d’aliments ultra-transformés) : ces facteurs issus de l’industrie agroalimentaire peuvent contribuer à la baisse hormonale. En cas de doute sur une fatigue ou des symptômes évocateurs d’un déficit hormonal (baisse marquée de libido, perte musculaire inexpliquée, etc.), consultez un médecin qui pourra faire un bilan sanguin. Si un véritable hypogonadisme est diagnostiqué, un traitement substitutif approprié et personnalisé pourra être discuté, plutôt que des tâtonnements en automédication.

Pour les femmes, passé 50 ans, là encore la DHEA n’est pas le remède miracle universel. Elle peut avoir sa place dans des situations ciblées (atrophie vaginale avec douleurs, sur prescription de prastérone par exemple). Mais pour le reste des troubles de la ménopause, les traitements hormonaux substitutifs classiques (œstrogènes/progestérone) encadrés médicalement ont montré bien plus d’efficacité que la DHEA, et les mesures hygiéno-diététiques demeurent cruciales. Une femme ménopausée tirera grand profit de la musculation pour lutter contre la fonte musculaire et l’ostéoporose. Hommes et femmes trouvent un terrain commun : une bonne condition physique aide à maintenir un profil hormonal favorable.

En définitive, la DHEA après 35 ans peut être vue comme un adjuvant ponctuel dans quelques scénarios médicaux bien précis, mais elle n’est ni la fontaine de jouvence vendue jadis, ni un outil de bien-être à utiliser à la légère. Son usage sans encadrement est non seulement déconseillé par les autorités de santé, mais aussi illégal en France. Quant aux questions que se posent légitimement nos lecteurs – « Ne suis-je pas en train de rater un secret anti-âge ? » – la réponse est rassurante : les véritables secrets d’une DHEA et d’une testostérone au top ne se trouvent pas dans une pilule miracle, mais dans l’adoption de choix de vie éclairés. Miser sur la prévention, l’activité physique, la gestion du stress et la nutrition, c’est préserver son capital hormonal naturellement.

Pour approfondir comment booster votre vitalité hormonale de façon naturelle et sûre, nous vous invitons à découvrir notre cours « Augmenter sa testostérone naturellement », qui synthétise l’expertise des chercheurs de référence en conseils applicables au quotidien.

En résumé, la DHEA n’est ni un poison ni la panacée. Après 35 ans, son utilité pour la plupart des gens est limitée, et son emploi mérite réflexion et prudence. Cette hormone aura eu le mérite de rappeler une leçon essentielle : en matière de santé et de performance, les solutions miracles sont rares, et l’élixir de jouvence se bricole souvent plus sûrement dans la salle de sport et l’assiette que dans un flacon de compléments. Les lecteurs soucieux d’optimiser leur forme en vieillissant trouveront davantage de réponses concrètes en suivant nos dossiers thématiques et en consultant des professionnels de santé qualifiés, plutôt qu’en cédant aux promesses non tenues de la DHEA.

À défaut de rajeunir, bien vieillir est un art de vivre à notre portée – un art qui ne s’achète pas en gélules, mais se cultive au quotidien avec un peu de bon sens.

Théo @Fitnessmith 

Références :

  1. DHEA supplements: Are they safe? Or effective? – Harvard Health
  2. Intracrinology and menopause: the science describing the cell-specific intracellular formation of estrogens and androgens from DHEA and their strictly local action and inactivation in peripheral tissues – PubMed
  3. Intracrinology and menopause: the science describing the cell-specific intracellular formation of estrogens and androgens from DHEA and their strictly local action and inactivation in peripheral tissues – PubMed
  4. Complément alimentaire : Déhydroépiandrostérone (DHEA)
  5. https://www.mdedge.com/rheumatologynews/article/44351/osteoarthritis/dhea-testosterone-show-no-antiaging-benefits/pdf
  6. DHEA supplements: Are they safe? Or effective? – Harvard Health
  7. Intracrinology and menopause: the science describing the cell-specific intracellular formation of estrogens and androgens from DHEA and their strictly local action and inactivation in peripheral tissues – PubMed
  8. Ennuis judiciaires à cause de la DHEA | SSI
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Fitnessmith (Théo) est un spécialiste de la musculation naturelle et de la nutrition depuis 2004. Ayant souffert d'obésité modérée dans sa jeunesse, il s'est formé pour comprendre et lutter contre son surpoids. Grâce au sport, à la nutrition et à une hygiène de vie saine, il a réussi à transformer son corps et son mode de vie. Passionné par l’optimisation physique et la performance, il a expérimenté et comparé différentes méthodes d'entraînement, notamment la force, l'hypertrophie et l'endurance musculaire, afin d’en analyser les effets sur le corps et la progression athlétique. Conscient que la transformation physique va bien au-delà de l’entraînement et de l’alimentation, il s'est également documenté sur la santé mentale, les troubles du comportement alimentaire (TCA), la dysmorphophobie, l'image de soi et les mécanismes de la motivation au changement, afin d’aider ceux qui souhaitent améliorer leur relation avec leur corps et leur bien-être global. Aujourd’hui, il partage son expertise et son expérience à travers son site , ses , ses et ses réseaux sociaux, notamment et . Auteur du livre aux éditions Eyrolles, il écrit également pour le magazine et intervient dans de nombreux sur le web. Il propose sur son site adaptés à ceux qui souhaitent perdre de la graisse et prendre du muscle, basés sur des données scientifiques et son expérience personnelle. Vous pouvez également . Avertissement : les informations fournies sur Fitnessmith.fr sont destinées à un usage informatif et ne remplacent pas les conseils d’un professionnel de santé. Fitnessmith.fr ne garantit pas l’exactitude, la fiabilité ou l’exhaustivité des contenus, et leur utilisation se fait sous votre entière responsabilité.

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